Poésie

Poésie 5

Melancholia

 

(extrait)
… Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?
Ces filles de huit ans qu’on voit cheminer seules ?
Ils s’en vont travailler quinze heures sous des meules
Ils vont, de l’aube au soir, faire éternellement
Dans la même prison le même mouvement.
Accroupis sous les dents d’une machine sombre,
Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l’ombre,
Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,
Ils travaillent. Tout est d’airain, tout est de fer. 
Jamais on ne s’arrête et jamais on ne joue.
[…]

Travail mauvais qui prend l’âge tendre en sa serre,
Qui produit la richesse en créant la misère,
Qui se sert d’un enfant ainsi que d’un outil !
Progrès dont on demande : Où va-t-il ? que veut-il ?
Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,
Une âme à la machine et la retire à l’homme !
Que ce travail, haï des mères, soit maudit !
Maudit comme le vice où l’on s’abâtardit,
Maudit comme l’opprobre et comme le blasphème !
Ô Dieu ! qu’il soit maudit au nom du travail même,
Au nom du vrai travail, sain, fécond, généreux,
Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux !

 

Victor HUGO
1802 – 1885

 

Poésie 4

Chanson de la Seine

La Seine a de la chance
Elle n’a pas de souci
Elle se la coule douce
Le jour comme la nuit
Et elle sort de sa source
Tout doucement, sans bruit,
sans sortir de son lit
Et sans se faire de mousse
Elle s’en va vers la mer
En passant par Paris.

La Seine a de la chance
Elle n’a pas de souci
Et quand elle se promène
Tout au long de ses quais
Avec sa belle robe verte
et ses lumières dorées
Notre-Dame jalouse,
immobile et sévère
De haut de toutes ses pierres
La regarde de travers

Mais la Seine s’en balance
Elle n’a pas de souci
Elle se la coule douce
Le jour comme la nuit
Et s’en va vers le Havre,
et s’en va vers la mer
En passant comme un rêve
Au milieu des mystères
Des misères de Paris.

Jacques Prévert

 

 

Poésie 3

Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen

1789

Article premier.

Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.

 

Article II.

Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression.

 

Article III.

Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément.

 

 

Article IV.

La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. […]

 

Article V.

La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas.

 

Article VI.

La Loi est l’expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentans, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. […]

 

Article VII.

Nul homme ne peut être accusé, arrêté, ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout Citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi, doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance.

[…]

 

Article X.

Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi.

 

Article XI.

La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi.

 

Article XII.

La garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

 

 

Poésie 2

Voyages

Je voudrais faire des voyages,
Aller très vite, aller très loin…
Je voudrais voir tous les rivages
Des mers que je ne connais point.

Mais je n’ai qu’une patinette
Et un petit cheval de bois!
Le cheval a mauvaise tête,
La patinette fuit sous moi.

Si j’avais une bicyclette,
J’irais, dès le soleil levant,
Par les routes blanches et nettes;
J’irais plus vite que le vent.

Si j’avais une automobile
Je roulerais au clair matin ;
Je roulerais de ville en ville,
Jusqu’aux murailles de Pékin.

Je voudrais une paire d’ailes
Pour m’envoler au ciel profond,
Parmi les vives hirondelles…
Qu’on me donne un petit avion!

Ou bien des bottes de sept lieues…
Car je suis un petit Poucet
Qui voit passer des choses bleues,
Comme si l’Enchanteur passait.

Ernest PÉROCHON

 

 

Poésie 1

Mon école

Mon école est pleine d’images,
Pleine de fleurs et d’animaux,
Mon école est pleine de mots
Que l’on voit s’échapper des pages,
Pleine d’avions, de paysages,
De trains qui glissent tout là-bas
Où nous attendent les visages
Des amis qu’on ne connait pas.
Mon école est pleine de lettres,
Pleine de chiffres qui s’en vont
Grimper du plancher au plafond
Puis s’envolent par les fenêtres,
Pleine de jacinthes, d’oeillets,
Pleine de haricots qu’on sème ;
Ils fleurissent chaque semaine
Dans un pot et dans nos cahiers.
Ma classe est pleine de problèmes
Gentils ou coquins quelquefois,
De chansons, de vers, de poèmes,
Dont on aime la jolie voix
Pleine de contes et de rêves,
Blancs ou rouges, jaunes ou verts,
De bateaux voguant sur la mer
Quand une brise les soulève.

Pierre Gamarra

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